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Conflit Russo Ukrainien : l'alimentation s'en dessus dessous

Céréales et oléo protéagineux : risques croissants d'adultération et de contamination


Le conflit entre l’Ukraine et la Russie, engagé depuis des années mais intensifié ces derniers mois, met en tension nos ressources alimentaires : certaines sont directement produites dans ces pays, d’autres produites ailleurs en dépendent dans leur méthode de production. Les produits les plus directement touchés sont les céréales et oléoprotéagineux. Les stocks de grains existants sont pour beaucoup bloqués dans le pays exportateur, comme en Ukraine [1], empêchant leur écoulement normal sur les marchés, dont le marché européen.

Concernant les productions à venir, elles sont fortement compromises :

  • Sur le court terme l’absence de soins aux cultures (semis, amendement, phytosanitaires et récolte),

  • À long terme pour des raisons de perte de fertilité des terres bombardées d’une part, de la destruction des infrastructures de stockage d’autre part, et enfin du fait des prévisions d’augmentation du coût de l’énergie (machinerie et fertilisation). En conséquence de cette mise en danger des productions de céréales et d’oléoprotéagineux à l’Est de l’Europe, deux choses sont à prévoir : l’adultération et la raréfaction des productions concernées ainsi que la raréfaction des produits qui en dépendent.

Pour la farine de blé, il y a une augmentation des risques qu’elle soit coupé par des farines à haute teneur protéique : on peut citer les farines de légumineuse, pour compenser la faible qualité et la rareté des grains. Le même phénomène est attendu concernant les produits transformés à base de légumineuse, avec des dilutions possibles et l’introduction d’un risque allergène.

Des pays comme l’Egypte ou la Tunisie importent plus de 60 % de leurs besoins en blé. Dans les pays du Sud Sahara, ce chiffre monte à 77 %. A ce jour, la France dispose d’un surplus exportable de blé estimé entre 1 et 1,5 Mt. Pas de quoi compenser les 12 à 14 Mt qui devraient manquer dans les semaines à venir, en attendant les prochaines récoltes.


Le Maïs

Concernant le maïs, du fait des faibles rendements attendus, il est probable de voir entrer en alimentation humaine des grains initialement destinés à l’alimentation animale. Le risque de contamination - par les mycotoxines notamment – augmentera de façon proportionnelle.


L'huile

Enfin, l’huile de tournesol, produite au global à 80% par l’Ukraine et la Russie, pourrait être diluée par d’autres huiles végétales, moins chère et moins rares du fait du contexte actuel. La demande augmente est cela permet de spéculer plus facilement sur la matière, les consommateurs voyant les étales vides des supermarchés cela leur inspire à faire du stock et accentue la pénurie.


Autres produits dépendant des céréales et oléoprotéagineux : raréfaction, augmentation des prix et fraude



Le pain


Le pain et les produits de meunerie peuvent être cités en premier lieu. La pénurie de céréales entraine déjà une augmentation des prix des produits finaux dans certains pays , et la situation risque de s’éterniser au regard des prévisions pour les prochaines récoltes. Les mêmes phénomènes seront observés pour les boissons alcoolisées comme la bière, le gin ou la vodka fabriquées à partir de grain.


Le miel

Concernant le miel, l’Ukraine en a produit 68 000T en 2020. Ce volume est inatteignable sans les cultures de colza et de tournesol habituelles, d’autant plus que la récolte en elle-même est à remettre en question cette année.


La viande et le lait

Les produits issus de l’élevage, comme la viande et le lait, subiront eux aussi très probablement une augmentation de prix du fait de la pénurie de matières premières nécessaires à la ration animale.


Le Poisson et le sucre

Par ailleurs, la Russie est un exportateur majeur de poisson, les principaux étant le colin d’Alaska, la morue d’Atlantique et l’Eglefin. La perturbation des circuits d’approvisionnement pourrait entrainer à court terme une augmentation des prix de ces denrées et à long-terme, une falsification de l’origine du poisson russe, devenant originaire de pays voisins pouvant commercer plus facilement que la Russie avec le reste du monde.

Enfin, le sucre russe se fera de plus en plus rare sur les marchés mondiaux du fait de l’embargo actuellement mis en place sur le pays. Et même si les produits russes parviennent jusqu’au consommateur final, les chances d’écoulement s’amenuisent de jour en jour du fait du boycott des consommateurs pour ces produits.

Du fait de ces tensions importantes sur le marché mondial des produits alimentaires, des adultérations de produits sont à prévoir : fraudes à l’origine géographique, dilution, recettes non respectées, etc. Restez donc vigilants sur la qualité de vos ingrédients et de vos marchandises pour préserver vos propres productions, protéger vos marques et pour assurer la sécurité de vos clients tout en conservant leur confiance !


Sources

1. Baudart, C. B. (2022, 7 mars). VIDEO - Guerre Russie-Ukraine : « un enjeu de sécurité alimentaire considérable ». Réussir Grandes Cultures : le média des céréaliers. URL: https://www.reussir.fr/grandes-cultures/guerre-russie-ukraine-un-enjeu-de-securite-alimentaire-considerable


2. Joshua Minchin, J. M. (2022, 14 mars). Will the invasion of Ukraine spark a global food insecurity crisis? New Food Magazine. URL: https://www.newfoodmagazine.com/article/162731/will-the-invasion-of-ukraine-spark-a-global-food-insecurity-crisis/

3. Le Monde. (2022, 11 mars). Guerre en Ukraine : « L’augmentation des prix de l’énergie devrait plus correspondre à celle des deux conflits entre les Etats-Unis et l’Irak qu’aux deux premiers chocs pétroliers ». Le Monde.fr. URL: https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/03/11/guerre-en-ukraine-l-augmentation-des-prix-de-l-energie-devrait-plus-correspondre-a-celle-des-deux-conflits-entre-les-etats-unis-et-l-irak-qu-aux-deux-premiers-chocs-petroliers_6117099_3232.html

4. Alison Johnson, A. J. (2022, 28 mars). Food fraud and the Ukraine war. Foodmanufacture.Co.Uk. URL: https://www.foodmanufacture.co.uk/Article/2022/03/28/Food-fraud-and-the-Ukraine-war

5. Maryline DUMAS, M. D. (2022, 9 mars). Guerre en Ukraine : oui, la baguette de pain pourrait bientôt coûter 1,20€. France 3 Bourgogne-Franche-Comté. URL: https://france3-regions.francetvinfo.fr/bourgogne-franche-comte/yonne/guerre-en-ukraine-oui-la-baguette-de-pain-pourrait-bientot-couter-1-20-2489512.html

6. Marie De Vergès, M. V. (2022, 22 mars). L’Afrique paie déjà le prix de la guerre en Ukraine. Le Monde.fr. URL: https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/03/22/l-afrique-paie-deja-le-prix-de-la-guerre-en-ukraine_6118608_3212.html

7. Marie-Pierre Olphand, M. P. O. (2022, 22 mars). Miel d’Ukraine : l’Europe va devoir apprendre à vivre sans. rfi. URL: https://www.rfi.fr/fr/podcasts/chronique-des-mati%C3%A8res-premi%C3%A8res/20220322-miel-d-ukraine-l-europe-va-devoir-apprendre-%C3%A0-vivre-sans

8. P.L. (2022, 7 mars). L’Ukraine introduit des quotas d’exportation de certains produits agricoles. BFM BUSINESS. URL: https://www.bfmtv.com/economie/international/l-ukraine-introduit-des-quotas-d-exportation-de-certains-produits-agricoles_AD-202203070297.html

9. V.C. (2022, 1 mars). Crise Ukraine-Russie : le marché du sucre progresse dans le sillage de la flambée du pétrole. Les Marchés. URL: https://www.reussir.fr/lesmarches/la-crise-ukraine-russie-dope-le-marche-du-sucre-dans-le-sillage-du-petrole

10. Christopher Gaudoin, C. G. (2018, 9 novembre). La politique sucrière en Russie : une stratégie de substitution aux importations. Agriculture Stratégies. URL: https://www.agriculture-strategies.eu/2018/11/la-politique-sucriere-en-russie

11. Neïla Beyler, N. B. (2022, 1 mars). Guerre en Ukraine : le boycott de la vodka russe gagne du terrain. Les Echos. URL: https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/guerre-en-ukraine-le-boycott-de-la-vodka-russe-gagne-du-terrain-1390447

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